Je te côtoie depuis plusieurs années maintenant, sans trop m’occuper de toi. Mais ce matin, je me suis rendue compte que tu faisais partie de ma vie depuis…le début !
Oui toi, Asperger qui m’empêche d’aller au devant des autres. J’ai des frissons rien qu’à l’idée d’entamer une conversation. Cachée derrière mon écran, je suis provocante et affable mais je suis incapable d’aligner correctement deux phrases IRL. Les mots se percutent et s’entrechoquent entre mes lèvres, mon regard cherche une issue de secours. J’ai appris à regarder mon interlocuteur dans les yeux, à le fixer avec le sourire pour le rassurer mais pour moi, ce n’est toujours pas naturel. Se toucher pour se faire la bise est pour moi la pire des corvées. Mais pourquoi est-ce que je suis obligée de me laisser approcher et toucher par ces inconnus pour une simple convention sociale ? Combien de fois est-ce que je suis partie sur la pointe des pieds pour éviter ces éternelles embrassades ?!
Dès que tu t’approches de moi, même pour m’embrasser, tu mets un pied dans mon espace vital. Cet espace, c’est ma carapace, mon armure qui me protège de tes propres humeurs et sentiments qui viendraient inévitablement polluer mon atmosphère. Zen, rester zen…même quand tu ressens la souffrance de cette personne qui vient te saluer. Souffrance physique ou morale, peu importe, tu m’as contaminée et tu repars, souriant, plus léger qu’avant.
Asperger, depuis que je me suis renseignée sur toi, je sais que ce n’est pas moi qui ne sait pas parler aux gens, mais que c’est toi qui m’empêche d’aller vers eux. Mon cerveau est programmé d’une certaine manière et m’empêche de me sentir à ma place et à l’aise en société. Je suis dans mon élément nulle part, j’ai toujours peur de mal faire, de ne pas avoir la bonne réaction. La maladresse fait partie de mon univers tout comme l’air étonné et amusé de mes interlocuteurs.
